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Le Français, Langue Etrangère, blog de Cathydung
1 avril 2011

Les figures de Femmes

 

les figures de femmes

 

Le livre d’Esther (un des livres de l’Ancien Testament- la Bible) présente trois figures de femmes : Vasti, la première reine du roi Assuérus[1] ; Esther est sa deuxième épouse et Zéresh est la femme d’Aman, le premier ministre du roi dont nous parlons ici deux qui sont plus importantes : Vasthi et Esther. Les deux femmes sont dans la cour royale et ont un même destin, même objectif : femmes-objets deviennent (ou veut devenir comme Vasti) femmes-sujets. Mais leur chemin ne se termine pas comme elles sont. Vasti va être oubliée après être abandonnée par le roi ; Esther va être reconnue, même son identité cachée depuis ses séjours au palais du roi.

 

Deux figures de femmes : femmes-objets deviennent femmes-sujets

  1. Vasti

 

Vasti est la femme d’Assuérus, roi des Perses. Lorsque le roi organise un grand banquet de cent quatre-vingts jours pour montrer sa richesse et sa magnificence de son royaume aux officiers, chefs de l’armée des Perses et des Mèdes et tous les gouverneurs (Est 1, 3-4). Il veut montrer aussi sa femme Vasti, car elle était très belle à voir (Est 1,11). Le tragique commence ici, le roi demande à la reine d’apparaitre devant lui et les convives. Mais la reine Vasti a refusé de se présenter selon l’ordonnance du roi, qui n’hésite pas à la répudier dès le moment où elle refuge d’exécuter son ordre de paraitre à la fête organisée, pour seule but d’y « montrer la beauté de son épouse » (les Rabbins supposent que la reine Vasti doit apparaitre nue au banquet). Le roi a traité sa femme comme objet : il se plaît à exhiber sa femme devant les invités au banquet. La coutume des Perses qui voulait que les épouses quittent la fête avant que les convives soient ivres et que les courtisanes entrent en scène[2]. Le roi Assuérus a donc traité la reine Vasthi en courtisane, il n’a aucun respect pour elle, seulement pour montrer sa richesse et sa femme est comme un de ses objets matériaux en quelque sorte.

Quant à Vasthi, elle garde sa dignité tout en gardant être reine du roi, et  sa dignité cause sa chute. « Vasti, la reine » c'est-à-dire une véritable souveraine. Vasti revendique sa dignité en refusant être devant le roi et ses offices quand ils sont dans l’ivresse ; une femme qui agit avec dignité de son état, mais elle est vite écartée de la scène, son nom est effacé après l’intronisation d’Esther. Vasthi refusant d’être un pur objet sexuel, elle est une figure courageuse, elle veut garder sa dignité même cela coûte sa vie.

Les observations du narrateur «  le septième jour, mis en gaieté par le vin…le roi ordonna de lui amener la reine Vasti… en vue de faire montrer de sa beauté. Le fait qu’elle est très belle » (Est 1, 10-11). Quand le roi était ivre et cette reine Vasti a été commandée à être « spectacle » devant le peuple et les princes, sa beauté devient un confit entre l'ordre royal (faire venir la reine) et les droits de femmes- au moins compris par Vasthi (les épouses n’entrent pas à la salle de fête quand les convives ivres). Même quand elle refuse d’être devant le roi, elle ne refuse pas sa fonction « être reine », elle refuse seulement d’être exhibée, or ce qu’elle refuse, le roi se montre hors de toute dignité. Vasti est différente d’Esther qui n’est pas dans le refus, cela transforme la concubine, l’objet reine de son mari et quelque part, dans le comportement du roi, elle est un pur objet, pourtant, elle se fait femme-sujet en refusant l’ordre du roi. La beauté de Vasti est pour le roi Assuérus est un objet pour exposition de son plaisir d’aimer sa richesse parlée dans le chapitre 1, 4.

Vasti, depuis femme-objet veut devenir femme-sujet et finalement elle ne le devient pas, car elle sera dans l’oubli. Avant sa chute, Vasti est toujours « Vasti la reine », quand elle a perdu sa face devant le roi, elle devient « Vasti » tout cours, (Est 1, 19), « la reine Vasti » ne revient plus, elle est « Vasti », elle n’a ni fonction, ni dignité. Quand le roi se souvient de Vasti et de sa « conduite qu’elle avait eue… », il ne dit pas la reine, mais seulement « Vasti » (Est 2,1). Vasti a tout perdu et cela revient à la question de la loi de talion, comme elle voulait revendiquer sa dignité, son nom est effacé après le chapitre 2, 1. C’est œil pour œil dent pour dent, en dehors de toute règle morale, non présence pour non présence. Vasti n’a pas voulu se présenter devant le roi, elle ne sera jamais présente par la suite, c’est la caricature de la loi de talion.

Il y a des ironies dans ce récit:

Vasti ne s’est pas présentée devant le roi et sa disgrâce comme une punition : «… interdire à Vasti de paraître en présence du roi Assuérus, et que le roi confère sa qualité de reine à une autre qui vaille mieux qu’elle » (Est 1,19), c’est ce qui est vraiment sa propre décision : « la reine Vasti refusa de venir selon l’ordre du roi… » (Est 1,12).

Une affaire domestique devient un drame national, le refus de Vasti influence toutes les femmes dans toutes les provinces, une seule femme désobéissante à son mari fait exploser la désobéissance des autres femmes : « ce n’est pas envers le roi seul que Vasti, la reine, a mal agi, mais envers tous les chefs et envers tous les peuples qui sont dans toutes provinces. Car l’affaire de la reine sortira vers toutes les femmes, les incitants à mépriser leurs maris à leurs yeux » (Est 1, 15-17).

 

  1. Esther

 

La chute de Vasthi permet Esther d’entrer dans la scène. Qui est cette nouvelle reine ? Pour l’instant, nous ne la savons pas, car son nom Esther veut dire « caché » ou « secrète ». Elle a caché son origine selon l’ordre de Mardochée, son oncle et aussi son père adoptif, car elle est orpheline de père et de mère (Est 2, 7), la situation d’une veuve. Esther entre en scène quand un décret du roi qui ordonne le recensement de toutes les filles belles et vierges du royaume, afin de remplacer le reine Vasthi. Grâce à sa beauté, (comme elle est très belle), Esther a gagné le concours. Mais Mardochée lui a demandé de cacher son origine juive, de peur que le roi Perse n’accepte pas d’une Juive. Elle est obéissante. Mardochée l’a faite un objet désirable dans la main du roi.

Avant le chapitre 4 elle est conforme ce qu’elle est, c'est-à-dire elle est obéissante. Dans la cour, elle ne sait même pas ce qui se passe avec Mardochée et son peuple, le décret du roi d’exterminer tout peuple d’Israël. Elle est dans la non-connaissance. Au contraire, Mardochée connaît parfaitement ce qui se passe chez le roi. Elle a donné à Mardochée des vêtements parce que celui-ci déchira ses habits, se revêtit d’un sac, c’est le vêtement de deuil, car le roi a donné un édit d’anéantir tous les Juifs dans le royaume de Perse. Mardochée refuse des vêtements, par contre, Esther reçoit chez lui l’édit de mort de son peuple, auquel elle n’a pas préparé. Mardochée lui demande d’intervenir auprès du roi pour son peuple, mais elle ne le veut pas, car elle veut sauver sa peau, et Mardochée l’insiste : ne croit pas d’être anonyme cela te sauve: « ne va pas t’imaginer que, parce que tu es dans le palais, seule d’entre les Juifs tu pourras être sauvée » (Est 4,13). Esther n’a pas d’autre choix de risquer sa vie.

Quelque soit l’intervention, il y a une délivrance. Si elle n’intervient pas elle sera anéantie avec son peuple, si elle intervient, elle risque sa vie car « …quiconque, homme ou femme pénètre sans convocation chez le roi…il doit mourir, à moins qu’en lui tendant son sceptre d’or le roi ne lui fasse grâce de la vie» (Est 4, 11). Mardochée l’insiste en posant la question qui sait ? Sa question est la réponse. Quelque part, Mardochée dit la raison de son silence pour mieux désarmer cela. Esther accepte la parole de Mardochée à la lettre.

Mais le statu d’Esther est changé, c’est la première fois qu’elle ordonne à Mardochée de faire selon sa demande : « va ressembler...jeûnez selon mon intention, ni mangez ni nu buvez de trois jours » (4,16). C’est la première fois qu’Esther bascule Mardochée, elle est sa créature devient son commandeure : « Mardochée se retira et exécuta les instructions d’Esther » (4,17). Un objet devient sujet, elle a été « manipulée » par Mardochée et lui obéit toujours, elle devient « manipulatrice » de Mardochée en ordonnant un commandement.  

Après avoir jeûné, elle quitte des vêtements de deuils et vêtit de toute sa splendeur. « Ainsi devenue éclatante de beauté… » elle va voir le roi et son projet sera accompli.

Depuis une femme a peu de tout « il y a trente jours que je n’ai pas été invitée à approcher le roi ! » (4,11)  « la reine s’effondra… elle appuya sa tête sur la servante qui l’accompagna » (5, 1d) devient une femme capable de tout : elle invite au Roi et Aman aux banquets et demander au roi de pendre Aman (Est 7, 6s).

Le livre d’Esther raconte donc l’histoire de femmes faibles dans un monde d’hommes, vont connaitre la puissance et la gloire. Dans Esther, l’accent est mis sur la prédominance des hommes à la cour de Perse, mais aussi fait surgir une figure de femme cachée devient connue.

Une « femme-objet » dans la main de Mardochée, « Esther va conquérir sa place de « femme-sujet », car c’est en véritable souveraine, libérée progressivement de des ses peurs (chapitre 4) qu’elle apparaît libre devant le roi (5,1) et non comme la femme exhibée, offerte à la concupiscence du souverain »[3].

 

Conclusion

 

Vasthi et Esther, deux figures de femmes qui ont le même destin, elles sont des femmes-objets par le désir des hommes, mais elles voulaient devenir femmes-sujets, et l’une parmi deux ne l’est pas. Quel que soit leur statu, ces femmes sont là pour donner un sens à la vie, (défendre la dignité de femmes, comme Vasthi) sauver la vie (comme Esther sauve les Juifs de la main d’Aman), rétablir la paix et faire la justice.

Catherine NGUYEN

 

 



[1]. Il y a des différentes traductions de noms: le roi Artacerxès (traduction grecque); Xerxès « Assuérus » (depuis l’hébreu  ’Ahaswerôs) ; Haman ou Aman ;  la reine Astîn (traduction grecque) Vasti  ou Vasthi.

[2] Voir lacoque A., Subversives ou un Pentateuque de femmes, Ed. du Cerf, Paris 1992, p. 69.

[3] Voir un bon article de P. Abadie dans Biblia, n° 76, p. 17.

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Commentaires
V
Ni hao ! :)
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